Dans sa semaine dédiée à Serge Gainsbourg, Couleur 3 consacre une émission à sa chanson « Le Sable et le soldat ». Celle-ci a été écrite par Gainsbourg un peu avant la Guerre des Six jours en 1967 mais a été découverte il y a une douzaine d’année seulement.
Depuis, peu d’artistes ont osé défendre l’Etat d’Israël en chanson. Est-ce par peur de faire de la politique, d’essuyer des critiques ? Comment analyser cette chanson tellement discrète ? Autant de questions qui ont été posées à Johanne Gurfinkiel, Secrétaire Général de la CICAD par le journaliste de Couleur 3 Nicolae Schiau dans son émission du 6 décembre 2010 à 7h.15 :
« Pour ce qui est du message de cette chanson de Gainsbourg, il y a un concept plus large qui va au-delà de la question patriotique » tranche d’entrée M. Gurfinkiel. « Sinon, nous tomberions dans cette accusation récurrente de double allégeance. Non. Il s’agit plutôt d’un lien d’Amour existant entre Jérusalem et l’ensemble des Juifs, religieux ou non ».
Une telle chanson pourrait-elle encore être écrite aujourd’hui dans le monde de la chanson francophone interroge le journaliste. « Oui. Cette chanson fait d’ailleurs encore sens aujourd’hui», répond M. Gurfinkiel. « La vision des uns et des autres par rapport à un conflit est très personnelle. La stigmatisation et l’instrumentalisation du conflit est telle que le simple fait de prononcer le nom d’Israël devient un sujet incendiaire, presqu’une une insulte. Incroyable ! Ce que Gainsbourg exprime dans cette chanson, nous pourrions encore l’entendre aujourd’hui »
Quelle cohérence pour la CICAD qui rappelle l’importance de dissocier la question de l’antisémitisme de la critique de la politique israélienne. Donc laisser la politique là où elle est. « Exactement, cela rejoint mon propos précédent » répond M. Gurfinkiel. « Il ne s’agit pas d’une question nationale ou politique mais plutôt d’une question spirituelle et culturelle, ce lien qui existe entre les Juifs et ce lieu névralgique du Judaïsme qu’est Jérusalem et la terre d’Israël ».
Mais le risque de confusion existe-t-il ? « Oui, c’est bien là le problème, l’instrumentalisation de ce conflit au Proche-Orient. La liberté d’expression est fondamentale mais elle ne peut être confondue avec une volonté affichée de diffamer ou de discriminer ». D’autre part, pour Johanne Gurfinkiel le texte de Gainsbourg est « une affirmation de son Amour pour cette terre et n’a rien à voir avec une question d’actualité ou de politique internationale. Il y a évidemment aussi dans cette chanson un message quelque peu politique , réaffirmant le droit à l’auto-défense. Mais il s’agit d’un point qui transcende les questions politiques en vérité. Il y a une certaine prudence chez Gainsbourg qui craignait justement d’être instrumentalisé ».
La chanson française a-t-elle évoluée depuis Gainsbourg ?« Malheureusement, aujourd’hui, il n’y a plus d’ « agitateur« qui souhaite faire passer un message ou une réflexion profonde sur des questions de société » déplore M Gurfinkiel. « Nous sommes plutôt dans une problématique de liberté d’expression dévoyée où, sous prétexte de la fondamentale liberté d’expression, certains nous inondent de messages violents et discriminatoires à l’égard d’un groupe en particulier, juif ou autres ». «Ils veulent s’arroger un droit à la discrimination. Il ne faut pourtant pas confondre « liberté d’expression« et « incitation à la violence« » poursuit-il. « Or, aujourd’hui, certains artistes s’inscrivent dans la deuxième catégorie. Nous ne sommes donc plus sur le même plan qu’à l’époque où des artistes comme Gainsbourg et Desproges étaient là pour éveiller des conscience. C’est clairement là que le changement est visible. Nous vivons actuellement dans une société de violence où ces « artistes« nous imposent un langage agressif qui n’a plus rien à voir avec les nobles objectifs visés par des artistes de l’époque de Gainsbourg. » conclut-il.
qui pourrait m’en empêcher ? 🙂